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CAROLE MOUSSET
CAROLE MOUSSET
CRU
Installation view, Chapelle XIV, Paris, 2023
curated by Joséphine Dupuy Chavanat
« Notre corps nous dégoute et nous mystifie, c’est nous, et en même temps tout ce que notre corps contient nous répugne. J’essaie de recapturer l’étonnement ancestral, archaïque face au corps et de créer une nouvelle esthétique qui rende justice à la beauté des organes ». – David Cronenberg
Attiré par une palette de couleurs acidulées – du rose dragée au bleu azur – notre œil effleure les formes douces des photographies de Lucile Boiron, molles des peintures de Carole Mousset, et délicates des dessins et sculptures d’Ellande Jaureguiberry. Nous nous avançons, puis un mouvement immédiat de recul s’opère alors qu’une question se pose : « Mais qu’est-ce que c’est ? ». Que regarde-t-on ?
Chacun des artistes recadre ou détaille un morceau de chair, un bout de corps sans artifice mis à nu dans son plus simple appareil. Il y a là quelque chose qui dérange ou repousse, qui remue notre habitude à ne pas faire frontalement face à notre finitude ou à notre croyance en un état de pureté. Notre corps n’est pas lisse, il s’abime, s’affaiblit, se ride, se plisse et se ravine. Il vit.
La morbidité déconcertante laisse peu à peu place à la curiosité. A la mort symbolisée par le fruit qui pourrit, répond l’élan de vie qu’incarnent – chacune à leur manière – les œuvres des trois artistes.
Flouté, encadré de jolies architectures ou enrobé d’agréables couleurs, le corps peut être regardé plus sereinement, sans s’en inquiéter. Un cycle perpétuel s’installe, où tout se digère pour recréer de nouvelles formes et de nouveaux organes. Les matières se mêlent, des excroissances se forment et l’ambiguïté jouent le rôle d’un catalyseur.
Bien qu’habité par Lucile ou incarné par Ellande, les corps féminin et masculin sont amplement dépassés. L’exploration de l’intérieur de la chair, embrassé par Carole dans ses peintures, abolie toutes les frontières de genre, d’âge ou d’orientation sexuelle. On se perd alors dans la matière, pris dans le fantasme de caresser les formes molles des organes. Ce fantasme est nourri par l’incompréhension et la part d’impalpable que suscitent les humeurs et les flux corporels qui nous traversent, mais aussi par le choix des matières malléables et charnelles comme la céramique, ou la pulsion scopique engendrée par la photographie.
Notre regard est ici médusé, et ce plaisir de posséder le corps de l’autre par le regard engendre une jouissance toute particulière. Il y a également ce plaisir à venir creuser dans la chair, explorer à l’intérieur, sans savoir exactement où on se trouve ou ce qu’on regarde précisément, jusqu’à se perdre dans une abstraction.
Carole la rapproche d’une sexualité visuelle, Lucile l’associe à une sorte de libido alors qu’Ellande convoque le contact langoureux et sensuel de la terre. La manipulation de la matière, des formes lymphatiques et des couleurs leur permet d’affirmer un érotisme singulier.
Les œuvres de Lucile, Carole et Ellande ont ceci en commun : elles interrogent l’inconnu, ce que nous craignons, ce que nous ne comprenons pas. Elles cherchent ce qu’il y a de merveilleux ou de magique en nous. Une transformation permanente dont émane une beauté douce et fragile. Bien qu’une dissection crue s’opère devant nos yeux, les artistes posent un regard tendre sur notre corps en mutation et développe une sensualité émancipatrice qui place la vie au cœur de leur travail. »
With Lucile Boiron & Ellande Jaureguiberry
photos : Romain Darnaud
curated by Joséphine Dupuy Chavanat
« Notre corps nous dégoute et nous mystifie, c’est nous, et en même temps tout ce que notre corps contient nous répugne. J’essaie de recapturer l’étonnement ancestral, archaïque face au corps et de créer une nouvelle esthétique qui rende justice à la beauté des organes ». – David Cronenberg
Attiré par une palette de couleurs acidulées – du rose dragée au bleu azur – notre œil effleure les formes douces des photographies de Lucile Boiron, molles des peintures de Carole Mousset, et délicates des dessins et sculptures d’Ellande Jaureguiberry. Nous nous avançons, puis un mouvement immédiat de recul s’opère alors qu’une question se pose : « Mais qu’est-ce que c’est ? ». Que regarde-t-on ?
Chacun des artistes recadre ou détaille un morceau de chair, un bout de corps sans artifice mis à nu dans son plus simple appareil. Il y a là quelque chose qui dérange ou repousse, qui remue notre habitude à ne pas faire frontalement face à notre finitude ou à notre croyance en un état de pureté. Notre corps n’est pas lisse, il s’abime, s’affaiblit, se ride, se plisse et se ravine. Il vit.
La morbidité déconcertante laisse peu à peu place à la curiosité. A la mort symbolisée par le fruit qui pourrit, répond l’élan de vie qu’incarnent – chacune à leur manière – les œuvres des trois artistes.
Flouté, encadré de jolies architectures ou enrobé d’agréables couleurs, le corps peut être regardé plus sereinement, sans s’en inquiéter. Un cycle perpétuel s’installe, où tout se digère pour recréer de nouvelles formes et de nouveaux organes. Les matières se mêlent, des excroissances se forment et l’ambiguïté jouent le rôle d’un catalyseur.
Bien qu’habité par Lucile ou incarné par Ellande, les corps féminin et masculin sont amplement dépassés. L’exploration de l’intérieur de la chair, embrassé par Carole dans ses peintures, abolie toutes les frontières de genre, d’âge ou d’orientation sexuelle. On se perd alors dans la matière, pris dans le fantasme de caresser les formes molles des organes. Ce fantasme est nourri par l’incompréhension et la part d’impalpable que suscitent les humeurs et les flux corporels qui nous traversent, mais aussi par le choix des matières malléables et charnelles comme la céramique, ou la pulsion scopique engendrée par la photographie.
Notre regard est ici médusé, et ce plaisir de posséder le corps de l’autre par le regard engendre une jouissance toute particulière. Il y a également ce plaisir à venir creuser dans la chair, explorer à l’intérieur, sans savoir exactement où on se trouve ou ce qu’on regarde précisément, jusqu’à se perdre dans une abstraction.
Carole la rapproche d’une sexualité visuelle, Lucile l’associe à une sorte de libido alors qu’Ellande convoque le contact langoureux et sensuel de la terre. La manipulation de la matière, des formes lymphatiques et des couleurs leur permet d’affirmer un érotisme singulier.
Les œuvres de Lucile, Carole et Ellande ont ceci en commun : elles interrogent l’inconnu, ce que nous craignons, ce que nous ne comprenons pas. Elles cherchent ce qu’il y a de merveilleux ou de magique en nous. Une transformation permanente dont émane une beauté douce et fragile. Bien qu’une dissection crue s’opère devant nos yeux, les artistes posent un regard tendre sur notre corps en mutation et développe une sensualité émancipatrice qui place la vie au cœur de leur travail. »
With Lucile Boiron & Ellande Jaureguiberry
photos : Romain Darnaud
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